09 janvier 2013

Mes films préférés de 2012

Entre le mercredi 4 janvier 2012 et le mardi 1er janvier 2013, j'aurais vu 165 films dans une salle de cinéma, soit 22 de plus qu'en 2011 et dix de moins qu'en 2010. Bonne moyenne. Je garde le rythme. Qualitativement, après l'excellent cru de 2011, 2012 s'est plutôt bien défendu. Voici donc, comme tous les ans, une liste de mes films préférés de cette année, garantis sans (presque) tous les films que vous avez vu dans des tops ciné ces dernières semaines...

(Et avec une petite entorse à la tradition)


1. Like Crazy
Je suis censé mettre dans ce top uniquement les films vus en salles cette année. C'est la règle. Sauf que... J'ai du faire face à un dilemme, cette année. Le plus beau film. Le film le plus intense. Le film le plus riche en émotion vu cette année n'est pas sorti en salles. Il est sorti en VOD. Ce film, c'est donc Like Crazy. J'ai longuement hésité à l'inclure. Mais je ne pouvais faire autrement. Ce film me hante. Parce qu'il est tout simplement le film le plus vrai que j'ai jamais vu sur le sentiment amoureux au 21e siècle. Like Crazy n'est pas une histoire de passion, comme on n'en voit des milliers au cinéma à longueur d'années. Like Crazy parle de l'Amour, simple, quotidien, presque banal. Il parle de comment il naît, de comment il se développe, de comment il meurt (éventuellement). Like Crazy est un film de tendresse, d'humour, de bien-être, d'égoïsme, d'implacabilité. Juste un film sur la seule chose qui nous rapproche en tant qu'être humain .


2. Nouveau Départ
Il paraît que je ne suis pas impartial pour juger un film de Cameron Crowe, mon idole  mon maître, mon Dieu. Il paraît que, peu importe le résultat, j'aimerais un film DE Cameron Crowe. Franchement ? Peut-être. Je ne me rends peut-être pas compte. Et alors ? Je m'en fous, en fait. J'aime Nouveau Départ. Et je l'aime pour exactement les mêmes raisons que j'aime ses cinq films précédents : pour son irrépressible envie de croire dans la bonté des êtres humains, pour ses petites phrases qui résonnent longtemps, très longtemps dans un coin un peu paumé de ma tête faisant alors battre mon coeur un peu plus fort que d'habitude, pour  tous ces silences, ces regards, ces sourires, ces moments de tendresse en apesanteur, pour son absence de cynisme et, enfin, pour tout ce que le film dit sur son auteur, en l'occurrence, ici, son divorce et le deuil de son amour de presque trente ans.


3. Les Bêtes du Sud Sauvage
Il y a des choses que seul le cinéma est capable de vous offrir. Des images. Des sons. Des sensations qui vous sortent de votre quotidien. C'est ce genre de voyages que m'a offert Les Bêtes du Sud Sauvage. Je vais au cinéma pour ce genre de voyage, ceux qui me font apprécier la vie sur Terre, me permette de me sentir humain, vivant, d'appartenir à une grande communauté. Voilà un film qui, par son lyrisme, la puissance de son histoire, de son décor et de ses personnages, arrive à montrer la beauté du monde, la beauté des coeurs et des âmes. Un vrai film sur l'humanité.


4. Detachment
A force de voir des films au cinéma, j'ai souvent tendance à me faire une opinion avant même de les voir. L'expérience m'a appris à reconnaître ce qui se cache derrière une bande-annonce, une stratégie marketing, une programmation, un genre ou sous-genre. Les films "sur l'éducation" par exemple : difficile de se tromper. Tous sont faits plus ou moins de la même manière, de Esprits Rebelles à Half Nelson en passant par Stand & Deliver. Avec Detachment, c'est donc plus ou moins ce que j'allais voir. Raté. Detachment est un coup de poing dans le ventre, un film sans espoir, sans rédemption. Un film nihiliste qui étale sa tristesse et son désespoir pour mieux vous mettre K.O. Parce que Detachment n'apporte pas de solutions miracles, ne fait pas croire au professeur plein de bonnes volontés qui pourrait changer le destin de ses élèves. Detachment montre une (certaine) réalité, celle où le malheur reste malheur. C'est exténuant mais salvateur.


5. The Descendants
Ce que j'aime chez Alexander Payne, c'est son talent pour parler d'histoires et de gens ordinaires. C'est son talent à saisir les petites manies agaçantes, l'ironie de situations banales et, en même temps, les rendre extraordinaires par son humour, son regard décalé. Extraordinaire directeur d'acteurs, il donne corps aux grands et aux petits drames, aux grands et petit bonheurs, avec la même intensité. Alexander Payne fait ce qu'on appelle communément de la comédie dramatique : faire rire et pleurer en l'espace d'une seule et petite minute. Parce que c'est à ça que ressemble la vie, la vraie, celle des vrais gens : elle ressemble à des moments tristes, durs, drôles, tendres, bizarres, absurdes. Elle ressemble à tout ça. Et c'est à tous ces moments que ressemblent The Descendants.


6. The We & The I
Retrouver l'énergie, l'innocence, l'humour, l'émotion, la vérité du Breakfast Club. Beaucoup ont tenté. Peu ont réussi. Encore moins pour parler de l'adolescence du 21e siècle, celle de YouTube et des réseaux sociaux. Est-ce que c'était l'objectif de Michel Gondry avec The We & The I ? J'en sais rien. Et peu importe. Pourtant, le résultat est là. Comme John Hughes, il confine ses ados tous très différents dans un lieu clos et il observe. Il observe leur humour, leurs répartis, leurs vannes, leurs non-dits, leurs peurs, leurs drames, leur mélancolie. Et c'est un bonheur. Car vieillir, c'est souvent oublier cette jeunesse. The We & The I rappelle donc que l'adolescence d'aujourd'hui n'est pas tant différente de celle d'hier, que seuls les outils changent.


7. Tyrannosaur
L'alcoolisme. L'extrême violence. Le chômage. Il y a dans Tyrannosaur beaucoup de désespoir et une absence totale d'illusions. L’âpreté du paysage social montré dans le film est parfois insoutenable. Et pourtant. C'est la lumière qui arrive à naître dans le regard de ses personnages qui fait du film une incroyable leçon d'espoir. Tyrannosaur prend aux tripes. C'est viscéral. Je suis sorti de la salle épuisé, chamboulé, bouleversé mais la leçon d'humanité qu'offrent les immenses Peter Mullan et Olivia Colman est inestimable. Une grosse claque.



8. Elle s'appelle Ruby
Elle est une de mes obsessions. La manic pixie dream girl, ce personnage qui n'existerait qu'au cinéma, cet être malicieux capable de redonner goût à la vie et à l'amour au plus mélancolique et triste des garçons. Elle m'obsède parce que je crois à cet être. Je crois qu'il existe dans ma réalité, pas seulement dans celle des films que je regarde et re-regarde. Elle m'obsède, surtout, parce que, comme le dit Ruby Sparks, elle ne semble ne pouvoir exister qu'à travers le regard de ce garçon. Suis-je à ce point comme le personnage incarné par Paul Dano, cet écrivain donnant naissance pour de vrai, par la force de son imagination, à cette manic pixie dream girl, la fille de ses rêves ? Je veux croire que non. Mais je ne peux m'empêcher de me retrouver dans ce portrait. Voilà pourquoi j'aime Ruby Sparks. Parce qu'il me force à me regarder en face, à affronter des trucs que je n'ai pas forcément envie de voir.


9. Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare
Il y a quelque chose dans le regard de Steve Carell, une tendresse, une mélancolie qu'on ne retrouve chez presque aucun autre acteur. Même dans ses pures comédies, il est là, ce regard. Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare n'est pas de celle-là. Il y avait donc une possibilité pour que ce regard me tire quelques larmes, comme ça avait déjà été un peu le cas auparavant. Et en effet... Je n'ai pas résisté. Malgré le ton teinté d'un humour très efficace, c'est la profonde mélancolie du film qui a emporté mon coeur. Notamment parce que je ne m'y attendais pas. Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare est d'un romantisme imparable. C'est un road-movie, d'une tendresse infinie, sur l'amour, l'amitié et la frontière (parfois invisible) entre les deux. Encore une histoire de manic pixie dream girl d'ailleurs. Ou serait-ce une histoire de manic pixie dream boy ?


10. Comme des frères
J'ai une fâcheuse tendance à pester contre la comédie française (classique, romantique ou dramatique), sur son manque d'audace, sur son uniformisation à l'outrance, sur la faiblesse de ses scénarios et de ses personnages. Et parfois, il se produit des miracles, de véritables petites bulles d'air qui redonnent (un peu) confiance. Comme des frères est de ceux-là. Voilà un film d'un mec qui n'a pas oublié que la comédie dramatique n'est pas une affaire de quelques minutes d'émotion quinze minutes avant le générique de fin. Voilà un film d'un mec qui a vu Capra, Lubitsch, Wilder, L. Brooks, Crowe et Apatow. Voilà un mec qui a compris que la comédie dramatique, c'est arrivé à faire (vraiment) rire dix secondes après avoir fait pleurer. Et inversement. Comme des frères, c'est de l'audace, des idées, encore des idées et  une tendresse infinie pour ses personnages. Dans ces cas-là, j'ai juste envie de dire merci.




02 janvier 2013

Mes albums préférés de 2012

Quatrième épisode de la retrospective annuelle de 2012 avec mes albums préférés. Je pense que c'est la liste la plus variée que j'ai jamais faite sur ce blog. Il y en a vraiment pour (presque) tous les goûts et c'est garanti sans Alt-J, Frank Ocean, Kendrick Lamar (il était 11e), Tame Impala et autres trucs que vous avez vu à peu partout ailleurs. Je vieillis.



1. Beach House - Bloom
J'ai toujours bien aimé Beach House. Mais j'ai toujours trouvé un peu chiants leurs albums. Cette voix languissante, ces mélodies lentes et éthérées. C'était agréable le temps d'une chanson, très vite lassant sur la durée d'un album. D'autant qu'en trois disques, le groupe n'avait jamais réellement fait évoluer son son. Chose faite cette année avec Bloom. Des mélodies plus animées, plus vivantes, plus rondes mais toujours avec cette puissante dose de mélancolie et des sons plus variés, il ne manquait plus que cela à Beach House pour devenir mon nouveau groupe préféré de l'année. En prime, ma chanson numéro 1 de l'année : Myth. De la beauté à l'état pure. [Ecouter sur Spotify]


2. First Aid Kit - The Lion's Roar
Le génie des Suédois en matière de pop-music, je le connaissais. Un peu moins celui pour le folk et la country, domaine de prédilection des Américains et des Anglais. Les deux soeurs Johanna et Klara, respectivement âgées de 22 et 19 ans, viennent donc apporter une corde aux nombreux talents des Suédois en matière de musique. Et ça passe d'abord par la mélodie, comme souvent au pays de Robyn et d'Ikéa. Voir The Lion's Roar ou Emmylou, par exemple. Mais ça passe aussi par la parfaite harmonie des leurs voix. Il y a une magie dans la combinaison de ces deux voix qui fait résonner leurs chansons dans mon coeur et fait frissonner mon corps entier. [Ecouter sur Spotify]


3. Joey Badass - 1999
Il a 17 ans. 17 putain d'années. Joey Badass est un surdoué. Rappelant parfois Nas à ses tous débuts, le jeune MC de Brooklyn possède une maturité dans son art sur laquelle beaucoup de ses aînés pourraient prendre exemple. D'abord, parce qu'il écrit avec un tel brio que ses paroles paraissent presque irréels dans la bouche d'un mec à peine démoulé : "Since '95 momma been workin 9 to 5, And I know the landlord fed up with our lives, So we pray up to Gods, the Ja's and the Allah's, To keep us safe and watch our lives, 'Cause all we tryin' to do is do good". Ensuite parce que son flow est d'une maîtrise absolue - sachant qu'on parle ici d'une mixtape probablement enregistrée dans une chambre. Enfin, parce qu'il arrive à mixer un certain esprit purement old school (qu'il n'a évidemment pas connu) avec la fougue de sa jeunesse et je trouve ça assez jubilatoire. [Télécharger gratuitement]


4. Max Richter - Vivaldi - The Four Seasons Recomposed
Je n'y connais pas grand chose en musique classique. J'aime ça mais je n'ai pas la culture. Par contre, je m'intéresse énormément depuis quelques petites années à ce qu'on peut appeler le néo-classique : Philip Glass, Michael Nyman, Johann Johannsson et justement Max Richter. Là encore, j'ai encore beaucoup de lacunes (je suis venu à eux par la musique de films) mais, à chaque fois que je découvre un des ces albums, je tombe sous le charme. Ce fut le cas avec cette étrange et atypique "recomposition" du fameux concerto de violon de Vivaldi par Max Richter. Difficile à expliquer le processus créatif derrière ce mot "recomposition". Reste la musique : on retrouve des mélodies, des éléments de Vivaldi mais le tout est une oeuvre de Max Richter. Vous ne réécoutez pas pour la millième fois les Quatre Saisons. Vous écoutez une oeuvre de 2012 avec sa modernité. Et c'est d'une beauté à peine croyable. [Ecouter sur Spotify]


5. Emeli Sandé - Our Version of Events
On assimile trop souvent la pop-music à des jeunes filles en mini-short et à des DJ à vestes fluos. On laisse souvent de côté des gens comme Emili Sandé. Des gens qui font de la pop-music avec la force du désespoir, avec des mélodies puissantes mais pas neuneu, avec des voix à vous donner des frissons au plus profond de votre être. On pourrait dire d'Emili Sandé qu'elle fait du R&B, de la soul, qu'elle est l'héritière de Whitney, d'Aretha, d'Ella ou de je-ne-sais-qui-d'autres. Mais la jeune chanteuse est autant l'héritière de ces divas magnifiques que de Joni Mitchell ou de Tracy Chapman. Emili Sandé fait juste de la pop-music, de la musique pour tous, populaire, bien arrangée, bien écrite. Une musique dans laquelle tout le monde peut se retrouver et se retrouve, sans pour autant perdre des neurones dans l'aventure. Une musique qui inspire et transcende les genres. De la putain de bonne musique pop - ce qui commence à devenir sacrément rare de nos jours. [Ecouter sur Spotify]


6. Killer Mike - R.A.P. Music
Si on le compare à Joey Badass sus-mentionné, Killer Mike, avec ses 37 ans au compteur, est ce que l'on peut aisément appelé un "vétéran". La première fois que je l'ai entendu, c'est sur le Stankonia d'Outkast en 2000. Depuis, il a sorti cinq albums dans la quasi-indifférence, malgré des qualités évidentes d'écriture, des talents indéniables de MC et une hargne politique rarement observée dans le hip-hop sudiste. Du coup, l'alliance inédite avec El-P, le producteur de Brooklyn, pour R.A.P. Music résonne comme une petite révolution. J'ai immédiatement pensé à AmeriKKKa's Most Wanted, le classique de Ice Cube produit par le Bomb Squad de Public Enemy en 1990. La rencontre de deux mondes presque radicalement opposées, la conscience politique, la sensibilité moite du sudiste Mike avec les sons bruts, presque expérimentaux de El-P. [Ecouter sur Spotify]


7. Big Boi - Vicious Lies & Dangerous Rumors
Big Boi est toujours passé pour le frimeur dans Outkast, le duo qu'il a formé pendant plus de dix ans avec Andre 3000, l'excentrique. Big Boi était le rappeur classique comme on a tendance à le caricaturer, celui qui parlait de sexe crûment, celui avec les bijoux et les belles voitures, tandis que son comparse était celui qui portait les vêtements psychédéliques et parlait de trucs compréhensibles que par lui. Mais voilà, les deux rappeurs ont toujours été les premiers à évoluer, à créer les modes plutôt qu'à les copier. Et Big Boi, derrière le bling bling, était l'artisan de ces évolutions, comme il a pu le prouver avec son incroyable premier album solo en 2010 et, aujourd'hui, avec ce deuxième album. Fun, décomplexé, parfois pop, les sonorités font autant appel au rap sudiste le plus pur qu'à l'électro pop en passant par le rock indé. D'un bout à l'autre, c'est brillant. [Ecouter sur Spotify]


8. Sigur Ros - Valtari
Sigur Ros est un de mes cinq groupes préférés de tous les temps. Pourtant, à chaque sortie d'albums, je suis décontenancé. J'écoute. Je laisse tomber six mois. Je réécoute et je comprends enfin pourquoi je les aime tant. C'est bizarre. Ils sont les seuls à me faire ça. Le pire, je crois, c'était pour la sortie en 2008 de Með Suð Í Eyrum Við Spilum Endalaust. Les chansons de 3-4 minutes. Les mélodies pop. Moi qui aimait avant tout les grandes envolées de 8-10 minutes, les chansons épiques sans refrain. Mais je m'y suis fait. Comme je me suis fait au retour aux sources de Valtari, leur album le plus intimiste depuis Von en 1997. Presque dénué de percussions, Valtari fait penser à Riceboy Sleeps, la percée néo-classique et ambient de Jonsi en 2009. Fini la grandiloquence, les guitares saturées et la dramaturgie, Valtari est un album fragile, tendre, toujours aussi mélancolique mais calme et apaisant. [Ecouter sur Spotify]


9. Perfume Genius - Put Your Back N 2 It
Le jeune Perfume Genius, qui avait enregistré son premier album dans le sous-sol de la maison de sa mère, ne change pas beaucoup sa formule. Des chansons épurées et minimalistes autour d'une voix fragile et d'un piano ou de vagues de synthés.  Des chansons qui vous font ressentir l'hésitation, la peur, la fragilité de son auteur. Un album qui fait presque mal à écouter tant il y a de douleurs dans cette voix, dans ces arrangements, dans ces chansons très courtes, tellement courtes qu'elles paraissent inachevées. [Ecouter sur Spotify]



10. Imperial Teen - Feel The Sound
Voici un groupe qui n'avait rien sorti depuis plus de cinq ans, après quatre albums depuis 1996. Créé par le clavier de Faith No More et d'autres membres influents de la scène indie de San Francisco, Imperial Teen fait un rock épique qui sent bon l'adolescence, malgré l'âge pas mal avancé de ses membres. Les garçons et les filles chantent ensemble. Les mélodies sentent bon le soleil californien et le tout donne envie de partir en virée en décapotable. Délicieusement fun. [Ecouter sur Spotify]